Comprendre l’architecture Internet

La neutralité du Net est un principe qui remonte aux premiers développements d’Internet. Le réseau Internet – réseau de réseaux – est composé de deux architectures distinctes :

  • l’«architecture physique» d’Internet qu’est le réseau lui-même. Il peut s’agir d’un réseau filaire (réseau téléphonique commuté, le câble, désormais la fibre optique) ou hertzien (Internet par satellite, 3G, Wifi, Wimax) ;
  • l’«architecture logique» d’Internet, composée des protocoles et standards de communication permettant le transport de données sur les réseaux, tels que l’Internet Protocol (IP), le Transmission Control Protocol (TCP) ou l’HyperText Transfer Protocol (HTTP) sur lequel est basé le Web.

Alors que, historiquement, l’architecture physique était la propriété d’opérateurs privés ou d’entreprises publiques, pour la plupart en situation de monopole (jusque dans les années 1970-1980), l’architecture logique a toujours été ouverte et non-propriétaire, c’est-à-dire accessible à tous. C’est ce qui permet de faire d’Internet un réseau capable d’accueillir une grande variété d’usages, sans qu’aucune autorité centralisée ne puisse privilégier une utilisation spécifique du réseau. Ainsi, de nouveaux services et applications peuvent être distribués librement, contribuant à la formation d’un écosystème d’innovations bénéfiques à l’ensemble de la société.

 

Le protocole IP permet de signaler différents niveaux de priorité des données qui composent le trafic Internet (champ DSCP dans IPv4 et « Traffic Class » dans IPv6). Les équipements qui composent l’architecture physique du réseau, tels que les routeurs4, autorisent les opérateurs à tenir compte des niveaux de priorité indiqués, et ainsi de gérer de façon différenciée les paquets de données transportés. En pratique, cette technique est très peu utilisée car ces informations sont mises par l’émetteur, qui peut donc indiquer ce qui lui donnera la meilleure priorité. Les techniques « discriminantes » aujourd’hui, reposent davantage sur d’autres champs (comme les numéros de port) ou sur un examen approfondi du paquet (deep packet inspection). Les équipements permettant cela sont aujourd’hui largement déployés par les opérateurs de télécommunications, qui sont donc en mesure de mettre fin à la neutralité du Net.

Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI’s), appuyés en cela par les industries culturelles (qui fournissent du contenu), voudraient notamment être en mesure de :

  • contenir l’accroissement de la demande en bande passante en ralentissant certains usages intensifs en bande passante, telle la vidéo à la demande ;
  • développer de nouveaux modèles économiques donnant naissance à un Internet à plusieurs vitesses, en donnant une priorité de transport à certains services et applications contre rémunération.

Il faut également noter le développement d’autres types d’atteintes au principe de neutralité du Net. C’est le cas notamment des mesures administratives de filtrage et de blocage de sites Internet, qui se développent dans le monde et en Europe, notamment en matière de contenus pédopornographiques.

Tentons de comprendre, en quelques images, ce que vous envoyez lorsque vous naviguez sur internet

(Accrochez-vous, c’est la partie la plus ardue de l’explication).

Nous partirons d’une image du site de l’AWT.

Vos paquets sont divisés en plusieurs petits paquets IP. Pour transporter vos paquets d'information sur Internet, on utilise le protocole de transfert Tcp/IP.

voici un paquet IP. Remarquez que votre message (données-en rouge) n'est qu'une partie des infos contenues dans le paquet. Le reste ce sont les adresses de l’émetteur, du récepteur et des informations pour les routeurs (en cas de panne, en cas de congestion, en cas de succès du passage,...)

Ajoutons que ce "datagramme IP" encapsule donc dans le segment données (data) d'autres informations qui précisent, elles, comment utiliser ce paquet reçu (reconstituer votre message à partir des multiples paquets IP reçus, vérifier quel matériel de votre ordinateur traite cette info, quelle application utiliser pour afficher ce type d'info, est-ce une photo ? , est-ce du son ?, ...). Ces différentes tâches s’exécutent dans différentes "couches" de votre ordinateur.

Ce trajet de votre message est basé sur ce que l'on appelle le "modèle OSI". C'est par toutes ces couches que passe la photo avant que votre grand-mère l'affiche sur son écran. Quand vous comprenez ça, vous commencez à comprendre le monde des ordinateurs. Faite une recherche sur le "modèle OSI".

 

 

Tentons en quelques images de comprendre par où passent vos petits paquets IP :

 

votre ordinateur est connecté à Internet via votre FAI (à qui vous payez ce service de connexion au réseau)

Voyez à quoi ça peut ressembler au niveau mondial (ISP=FAI , Backbone=très gros tuyaux)

Vos paquets d'information passent par une multitude de routeurs avant d'arriver à destination (par exemple : le serveur de youtube ou votre grand-mère). Il y a donc une multitude de chemins possibles pour arriver à destination. Si un routeur tombe, il reste plusieurs possibilités d'itinéraires. C'est pour cela qu'Internet est difficilement contrôlable et presqu' indestructible.

Ca y est ! Votre grand-mère voit votre photo et l'imprime.

 

 

Vidéos pour aller plus loin.

 

En guise d’introduction : émission Kezako « Comment fonctionne Internet ? »

Un reportage de la revue tech’ dans le cœur du réseau Numericable. : Comment fonctionne Internet depuis les années 50 jusqu’à aujourd’hui ? (parties 1&2)

Si vous comprenez un peu l’anglais, ce petit film de « science-fiction » vous explique les réseaux de manière amusante.

Chez vous, derrière votre routeur domestique, voici comment votre ordinateur, votre tablette ou votre smartphone traitent l’arrivée des paquets.

 

Quel gouvernance ?

Il y a de multiples possibilités d’intervenir dans la communication entre vous et votre grand-mère. Comment veut-on gérer le réseau? Qui joue quel rôle dans la distribution de vos paquets ?

C’est une question que se pose Benjamin Bayart, patron du plus ancien FAI associatif de France dans cette vidéo :

« Internet ou Minitel2.0 ? « 

Conférence de Benjamin Bayart aux 8e rencontres mondiales du logiciel libre, à Amiens (13 juillet 2007) : http://www.fdn.fr/minitel.pdf

 

 

Un internet sans FAIs ?

Maintenant que vous avez compris que les utilisateurs ont leur mot à dire dans cette organisation de l’architecture Internet, nous pouvons légitimement nous demander si le passage par un FAI est un bien ou un mal nécessaire.  Serait-il possible de s’en passer ?

 

Projet commotion  : Un internet sans FAI’s ?  C’est possible mais personne n’y avait sérieusement pensé. Mais les auteurs américains du projet commotion (notamment subsidié par le gouvernement US) lancent aujourd’hui un pavé dans la mare!  Leur but : permettre la création d’un réseau d’utilisateurs sans passer par le routage classique dévolu aux fournisseurs. On appelle ça un mesh.

Les logiciels de Commotion transforment un routeur Wi-Fi, un PC ou un smartphone en relais capable de former un réseau. Ainsi, chaque périphérique est en mesure de trier, de router les données vers leurs destinataires. De plus, ce réseau peut aussi se connecter au reste du monde puisque si un seul appareil se connecte à Internet, il donne l’accès à tous les autres.  Cet internet-là nous intéresse au plus haut point en tant que citoyens, car plus de FAI = plus de passage obligé, plus de goulot d’étranglement à réguler = contrôle et censure impossible à grande échelle. Ce projet pourrait révolutionner Internet ! En savoir plus

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