À PROPOS

L’idéologie managériale, indissociable du néolibéralisme, est déshumanisante. Elle n’épargne ni le secteur privé ni le secteur public. Mais une école, une université, un hôpital, une asbl, un État, doivent-ils être gérés comme une entreprise ?

Le New public Management, c’est la dictature du chiffre, du quantitatif, du management basé sur le contrôle et les évaluations des coûts. Nous sommes loin du projet citoyen, de la décision commune. C’est le règne de la technicité, des experts, de l’économique et de la logique du marché. Le management ou le néo-management, né à la fin des années 1990 nous a fait passer du modèle d’autorité bureaucratique fondé sur l’impersonnalité des règles et l’automatisme des expertises, à un modèle de « soft power » fondé sur l’ultra-personnalisation des talents, des projets et des récompenses. Il en résulte une vision individualiste de la concurrence entre tous, fondée sur les compétences et l’absence d’états d’âme. Toutes les activités humaines et économiques sont objectivées de telle manière qu’elles se traduisent en variables, en indicateurs de mesure rationnels, en capitaux.

Auparavant, le type de souffrance liée au travail était généralement d’ordre physique. Si la dureté et la pénibilité physique n’ont évidemment pas disparu, un autre type de souffrance, d’ordre psychique (pression, culture de l’urgence, instrumentalisation, injonctions paradoxales, isolement, dégradation de l’amour du métier, perte de sens…) tend à prévaloir principalement dans nos sociétés développées.

La tension entre les valeurs et la loyauté devient insupportable pour un nombre croissant de travailleurs. Il faut s’adapter à une compétitivité féroce, à la culture du résultat et à celle de la haute performance. L’idéologie gestionnaire du « new public management » déshumanise le monde du travail en isolant les individus, en imposant le management par objectifs (faire plus avec moins) ou l’évaluation individuelle des performances, dont les résultats ne reflètent pas l’ensemble du travail.

Si le personnel se plaint du stress, les DRH, ou les gérants du Capital humain élaboreront un plan de prévention de risques psycho-sociaux; offriront des séminaires de gestion du stress, des séances de méditation par le yoga, des thérapies par le rire, etc. Ils géreront les souffrances d’une manière technocratique – quand celles-ci ne sont pas niées tout simplement –, une manière de masquer le caractère pathologique de l’organisation du travail et d’aseptiser une violence structurelle.

Le travail peut aussi constituer une activité socialisatrice et émancipatrice. Résister aux logiques néo-managériales et à la subordination, développer un autre rapport au travail est légitime, possible et urgent.